Le Monde diplomatique
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L'empire contre l'Irak
   

L'Irak, un pouvoir à abattre

Depuis sa défaite au printemps 1991 et l'écrasement du soulèvement populaire, le régime irakien a consolidé son emprise sur la société. Ni l'embargo, maintenant vieux de plus de douze ans, ni les bombardements ponctuels par les forces anglo-américaines ne sont parvenues à l'ébranler. Alors que le pays se délite, que les Irakiens souffrent de mille et une privations, que la santé et l'éducation sont les premières victimes des sanctions internationales, le pouvoir s'est renforcé à travers une répression impitoyable. Les inspecteurs des Nations unies ont accompli, entre 1991 et 1998, un important travail pour désarmer le pays - malgré les man ?uvres dilatoires de Bagdad - et le débarrasser d'une grande partie de ses armes de destruction massive. Mais la décision de Washington d'imposer le départ des inspecteurs en décembre 1998 et de lancer contre l'Irak l'opération « Renard du désert » a mis fin à ce travail et à tous les instruments de contrôle installés par les Nations unies.

Dès son arrivée au pouvoir, l'administration Bush a décidé d'en finir avec le régime du président Saddam Hussein. C'est l'attaque du 11 septembre 2001 qui a créé aux Etats-Unis les conditions d'une telle guerre, bien qu'aucune preuve n'ait pu être apportée d'une relation entre Al-Qaida et le pouvoir de Bagdad. Après le vote de la résolution 1441 par le Conseil de sécurité des Nations unies et le retour des inspecteurs en Irak, Washington a maintenu sa pression et se prépare à la guerre malgré les multiples réticences de la majorité des gouvernements du monde et l'opposition de l'opinion publique internationale. En février 2003, les Etats-Unis auront massé plus de 150 000 soldats dans la région. Un consensus se dégage chez les stratèges américains pour dire que la guerre sera courte et que l'armée irakienne ne pourra opposer qu'une réaction symbolique.

La vraie préoccupation porte sur l'après-guerre. Si les immenses réserves pétrolières du pays permettront de financer l'occupation américaine et une partie de la reconstruction, les Etats-Unis risquent de se heurter à d'énormes difficultés pour gérer le pays. L'opposition est en effet divisée ; le régime a joué au long de ces dernières années sur les solidarités tribales dont il faudra tenir compte ; les revendications kurdes pèsent sur l'avenir ; enfin, l'accumulation des haines et des ranc ?urs durant les longues années de dictature risquent de déboucher sur les règlements de comptes et le chaos. Sans parler de l'ingérence des puissances voisines, notamment de l'Iran et de la Turquie. Enfin, si on en croit l'expérience de l'Afghanistan, la compétence des Etats-Unis pour assurer une administration quotidienne de l'Irak paraît plus que douteuse.

Mais la guerre aura aussi des conséquences sur le Proche-Orient en déstabilisant un peu plus une région déjà déchirée, notamment par le conflit israélo-arabe.

 

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